Le taux de représentativité des femmes entrepreneures en Afrique est de 26 % alors que celui de l’Europe ne s’élève qu’à 6 % s (Cf. Women Entrepreneurship in Africa : à path to empowerment). L’Afrique est la seule région au monde où plus de femmes que d’hommes choisissent la voie de l’entrepreneuriat, une réalité dont on ne parle pas assez. Devenir entrepreneure est un choix qui, pour la plupart s’est imposé à ces femmes. Aujourd’hui, de nouvelles figures féminines émergent sur la scène africaine des start-ups. Viva Tecchnology, ou Viva tech, le salon consacré à l’innovation technologique et aux start-ups met en avant ces entrepreneuses qui luttent pour le développement de leur continent, en défendant des valeurs sociales et environnementales. Découvrons quelques femmes startuppeuses qui bougent et font bouger les choses en Afrique.
Véna Arielle Ahouansou, à 25 ans, elle est médecin aujourd’hui entrepreneure. Elle lance la carte d’identité médicale universelle pour assurer la traçabilité du circuit médical des patients, au Bénin. “J’ai vu une patiente mourir parce qu’on ne disposait pas de son groupe sanguin assez rapidement pour la transfuser. Le manque d’accessibilité aux informations médicales des patients a un coût humain élevé en Afrique. Pour relever ce défi de santé publique, j’ai opté pour l’entrepreneuriat”, témoigne Véna. KEA Médical, son entreprise, est une plateforme disponible sur internet et via son application, permet de centraliser les informations médicales d’un patient sur une base de données en ligne, accessible aux hôpitaux et aux médecins, où qu’ils soient. L’utilisateur se crée un compte et répond à plusieurs questions concernant son groupe sanguin, ses antécédents médicaux, ses allergies, s’il est atteint d’une maladie et les personnes à contacter en cas d’urgence.
Bilikiss Adebiyi Abiola, née au Nigeria, trouve l’idée d’une entreprise de recyclage au cours de sa deuxième année au MIT, où elle étudie la gestion des déchets. Son idée initiale est d’augmenter la quantité de déchets collectée auprès des ménages en leur offrant des billets de tombola en échange. Quand elle discute de cette idée au Nigeria, durant ses vacances, elle est surprise de l’intérêt rencontré. Les déchets sont une source de nuisances à Lagos, seul un faible pourcentage étant collecté régulièrement. Elle est de retour à Lagos en 2012, après l’obtention de son diplôme. Alors que ses enfants sont à l’école, elle approfondit son projet et y adjoint l’idée de tricycle pour la collecte, les Cleantech Wecycles.
Rania Belkahia est née à Casablanca. Elle développe l’e-commerce en Afrique en s’appuyant sur la diaspora. C’est sur ce marché quasiment vierge que Rania Belkahia a lancé Afrimarket en 2014 avec son associé Jérémy Stoss. Les deux associés font le constat d’un manque criant de services à valeur ajoutée pour les Africains, en particulier pour la classe moyenne émergente, au pouvoir d’achat en augmentation. Ils s’aperçoivent aussi sur place que les consommateurs ne privilégient pas obligatoirement le prix par rapport à la qualité. Ils lancent alors Afrimarket en Côte d’Ivoire et au Sénégal. Ils attaquent ce marché via la diaspora installée en Europe, en lui proposant d’acheter en ligne pour leurs proches en Afrique des produits locaux de qualité (alimentaire, équipement de la maison, électroménager).
Jasmine Samantar, une jeune somalienne de 26 ans qui a créé Samawat Energy, une startup spécialisée dans les kits solaires. Dans un pays déchiré depuis 27 ans par une guerre civile, elle allie l’audace au courage. Mogadiscio, ses clans, ses factions en guerre et ses startups. C’est dans le premier et unique espace de coworking de la capitale somalienne, iRise, qu’est basée l’entreprise de Jasmine Samantar, Samawat Energy. Cette jeune somalienne de 26 ans, née aux États-Unis, est rentrée à Mogadiscio il y a deux ans pour créer son entreprise spécialisée dans les kits solaires.
Fatoumata Bâ, après des années à travailler dans des entreprises de renoms, l’entrepreneuse sénégalaise créée Janngo, une start-up studio pour faciliter le quotidien des PME et des consommateurs africains. Plus qu’une start-up, Janngo est le premier start-up studio africain d’entreprises sociales, c’est-à-dire qu’elle développe des plateformes digitales clé en main afin d’améliorer l’accès au marché et la compétitivité des PME africaines, tout en générant des emplois qualifiés directs et indirects en particulier à destination de femmes et de jeunes. À la différence d’un incubateur ou d’un accélérateur, elle opère avec une équipe interne d’entrepreneurs en résidence qu’elle finance avec du capital propre afin de tester des solutions digitales aux problèmes rencontrés par les PME. Janngo signifie « demain » ou « avenir » en peul et traduit l’enjeu prégnant pour le continent de construire aujourd’hui les modèles économiques performants et inclusifs de demain.
Si leur réussite respective témoigne d’une évolution de la scène entrepreneuriale africaine, ces femmes se mobilisent pour ne pas rester des exceptions consolantes dans un univers tech très masculin. De nombreux business models se construisent à partir d’une problématique sociale, en particulier d’accessibilité à des services (Soins, éducation, énergie, gestion des déchets). Parmi ces figures féminines, la diaspora africaine est très bien représentée.
KHOUDIA GAYE
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