Des décennies après l’accès à l’Indépendance, la France s’est arrangée à maintenir plusieurs de ses anciennes colonies dans une forme de servitude économique garantie par les clauses du « pacte colonial ». Ce fameux accord officieux continue de remplir son objectif principal : protéger le pernicieux cordon ombilical qui lie la métropole à ses territoires africains. Ces pays continuent à déposer via leurs banques centrales 50% de leurs réserves de changes au Trésor français, en vertu dudit pacte-colonial.
De l’Afrique de l’ouest à l’Afrique centrale
Le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo pour l’Union économique et monétaire ouest-africaine « UEMOA », en plus du Cameroun, de la République Centrafricaine, du Tchad, du Congo, et du Gabon pour la Communauté économique et monétaire de l’Afrique Centrale « CEMAC », en sont les premiers concernés, selon le géo-économe sénégalais Siré Sy.
Des décennies après l’accès à l’Indépendance, ces pays continuent à déposer via leurs banques centrales 50% de leurs réserves de change au Trésor français, en vertu dudit pacte-colonial.
Puis, il en était de même pour la Banque des états de l’Afrique centrale « BEAC », en vertu de la nouvelle convention de compte d’opérations, signée le 5 janvier 2007 et qui a abaissé la quotité graduellement jusqu’à 50%, taux appliqué depuis le 1er juillet 2009.
Cette coopération monétaire entre la France et ses ex-colonies est « régie par quatre principes fondamentaux : garanties de convertibilité illimitée apportée par le trésor français, fixité des parités, libre transférabilité et centralisation des réserves de changes », indique le site officiel de la Banque de France.
Un pacte pour conserver une chasse gardée
Le renflouement du trésor de la Métropole par les colonies remonte au 19ème siècle. « Les autochtones payaient alors un impôt de capitation à la Métropole. Une imposition par tête d’habitant mais aussi pour les biens personnels (produits vivrières, cheptel…) payée individuellement ou collectées par des commis locaux », selon l’historien et enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Moustapha Dieng.
« Expropriation » et « esclavagisme » sont donc les maîtres-mots d’une politique française qui ne fait que « freiner la marche de ses ex-colonies » souvent définies comme étant sa propre « chasse gardée », se désole Sy.
Une situation qui a pour clef de voûte, selon lui, un traité avec des clauses publiques et des clauses secrètes qui continue de guider les relations France-Afrique, servant l’intérêt de la Métropole, au détriment de l’intérêt de bien des pays et nations africaines, bien que datant d’un autre âge.
Mais, les « servitudes » du pacte colonial, que dément catégoriquement Paris, n’en finissent pas. A part le versement d’une part de leurs avoirs en devises, le contrôle de la monnaie des pays en question (le Franc CFA) garantit à la Métropole l’exclusivité des exportations des matières premières locales, le pouvoir du marché local pour les importations et la définition des politiques à adopter par les pays africains en question.
« Toute tentative solitaire de résistance finira par échouer »
L’autre cri d’alarme est lancé par Mamadou Koulibaly, ancien président de l’Assemblée nationale ivoirienne, du temps de Laurent Gbagbo. Auteur de l’ouvrage « Les servitudes du pacte colonial », ce nationaliste ivoirien a déjà posé le doigt sur le mal généré par les clauses secrètes du pacte. Parmi lesquelles, « l’interdiction totale ou partielle du marché colonial aux produits étrangers, l’obligation d’exporter les produits coloniaux exclusivement ou principalement vers la métropole ; l’interdiction, par la colonie, de produire des objets manufacturés, pour se limiter à la production de matières premières et de débouché commercial ; en contrepartie d’aide politique, militaire, culturelle et souvent économique ».
Tout comme Siré Sy, Mahamadou Koulibaly, Moustapha Dieng, bien d’autres experts et penseurs africains sont conscient du mal colossal généré par ce pacte colonial. Sauf que les moyens de lutte et de résistance, sont très modestes, voire inefficaces, en l’absence de vrais leaders nationalistes, d’une union qui fait encore défaut à l’ensemble des dirigeants des pays concernés et de médias sérieux et responsables en mesure d’éveiller les consciences et de sensibiliser les peuples qui en payent le lourd tribut.
« Toute tentative solitaire de résistance finira par échouer. Les conflits armés qui pullulent dans le sahel en disent mieux. Il en faut une résistance collective assurée par les leaders politiques, les élites africaines et la société civile pour en finir avec ce pacte injuste », conclut le géostratège promettant de continuer le combat et d’œuvrer de concert avec le reste des nationalistes africains.
NN
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