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[SOCIÉTÉ] GUADELOUPE : UNE JEUNESSE À DEUX VITESSES ?

Manque de repères, absence de transmission des aînés, incompréhension des politiques mises en oeuvre… Les jeunes ont le sentiment d’être délaissés. Tout en reconnaissant évoluer dans une société en perte de valeurs, ils se cherchent un futur plus réjouissant. « Prendre en main l’avenir du pays » , c’est l’objectif, comme l’a rappelé Malick Nivelles, membre du Kolektif jénès Gwadloup. C’est dans cette optique que le bik a jénès se tiendra aujourd’hui pour trouver des solutions concrètes. Des exemples de ceux qui réussissent, il y en a certes, mais beaucoup connaissent la galère et espèrent des jours meilleurs. Des jeunes ont accepté de parler de leur quotidien et des maux qui gangrènent leur île.

DES JEUNES DU BLOCK 33, BAIE-MAHAULT : « Jalousie et mauvaises langues »

17 h 30. Dans les rues de Baie-Mahault, des jeunes du block 33 comme ils aiment à s’appeler sont rassemblés près d’un immeuble. Ils ont quitté l’école encore adolescents et sont reconnaissants à Ary Chalus, leur maire, de leur avoir trouvé un emploi à la mairie. Ces cinq garçons sont unanimes à reconnaître « les difficultés rencontrées pour s’en sortir » .

Leurs principales souffrances ? « La jalousie et les mauvaises langues des aînés. » Ces Baie-Mahaultiens vivent dans un monde où la violence existe, « mais c’est un fléau mondial » . Ils évoquent leur foi en Dieu, « face à la méchanceté des plus âgés qui tentent de nous détruire à travers des actes de magie noire » . Nos cinq jeunes font tout pour rester « de bons garçons » et justifient la délinquance de certains : « Ceux qui volent le font par nécessité dans un monde où la pauvreté guette les plus faibles » .
Ce petit groupe rencontré dans la rue, oeuvre dans une association, Hope évolution. Sa mission : aider les jeunes en déshérence.

ZACHARY, 31 ANS, BASSE-TERRE : « Sans repères et prisonniers du virtuel »

Derrière son grand bureau, Zachary, détenteur d’une licence en informatique est haut fonctionnaire. Amoureux de sa Guadeloupe natale, il possède un avis bien tranché sur la société antillaise qu’il dit « perdue » . « Sans repères, prisonnière du virtuel, la jeunesse ne prend que les mauvais exemples et manque cruellement de culture. »
Admiratif de l’ancienne génération, Zachary déplore l’absence de transmission des valeurs. « Les jeunes se complaisent dans le paraître ou encore l’argent. » Il ne voit aucun espoir pour l’avenir.
Malgré tout, le jeune homme se dit bien dans sa peau dans la mesure où il évolue dans un groupe d’amis qui allie traditions et modernité à travers une vie simple où prime la nature et surtout la solidarité hors de ce système mondialiste de consommation. Il conclut : « Voter est inutile puisque les politiciens n’apportent aucune solution concrète, l’abstention est donc la meilleure des solutions pour que le pouvoir revienne au peuple. »

JA RULE, 29 ANS, LACROIX/ABYMES : « On ne peut pas régler les problèmes de violence et de chômage »

Entouré de ses amis et des enfants de ce quartier chaud limitrophe de Pointe-à-Pitre, Ja Rule, c’est son pseudonyme, se détend dans la cour de son immeuble.
Détenteur d’un CAP dans le domaine du bâtiment, il a travaillé dans l’industrie pendant trois ans. Attiré par la vie de la rue, il se plait dans les méandres du « business facile » . Comme pour quitter cette vie, il regagne la France puis revient au pays « où rien n’a changé. La violence et les gangs sont toujours d’actualité » .
Actuellement au chômage, il compte reprendre « un vrai travail » en août. Défaitiste, Ja rule pense qu’« on ne peut pas régler les problèmes de violence ou encore de chômage » . Le jeune homme perçoit ces problématiques de manière arbitraire. « Même si on donne du travail aux jeunes lascars, l’appât du gain les poussera toujours vers la vie du ghetto à cause de la télé et des politiciens qui ne font pas leur travail » . Réaliste, il reconnaît tout de même que cette vie ne vaut que pour un laps de temps déterminé car, « même si débouya pa péché, il arrive un moment où tu veux voir tes enfants grandir » .

FABIENNE, 35 ANS, POINTE-À-PITRE : « Nous devons nous battre »

Sur le boulevard, près du CHU, est installée Les désirs du palais, une pâtisserie-glacier avec à sa tête une jeune chef d’entreprise, Fabienne.
La jeune femme a commencé comme chef de rayon dans un supermarché avant de suivre une formation de pâtisserie puis de glacier en France, grâce à une opportunité à Nantes.
Alliant sa formation aux saveurs de son île, Fabienne crée des glaces uniques dont raffolent clients locaux et touristes. Elle a d’ailleurs multiplié les prix aux concours de Fanm Péyi, Fanm doubout ou encore le deuxième prix du concours des artisans.
Sa plus grande satisfaction est de mettre en valeurs les produits de chez nous.
Fabienne considère que « les jeunes doivent se battre pour réussir et croire en leur rêve car il n’y a que le travail qui puisse payer » .

LOUISIANA, 24 ANS, LAMENTIN : « Des promesses des politiques non tenues »

Cité Crane, il y a des jeunes hommes qui traînent mais aussi des mères de famille qui tentent de joindre les deux bouts.
Louisiana, volontaire mais qui s’estime incomprise, en fait partie. Mère de quatre enfants et sans emploi, elle a arrêté l’école en troisième lorsqu’elle a eu son premier enfant. De petits boulots en périodes de chômage, elle parvient difficilement à s’en sortir. « Derrière les belles promesses des politiciens, il y a une vie où les étrangers passent avant les Guadeloupéens qui ne voient pas le bout du tunnel » , explique-t-elle.
Elle refuse pourtant cette fatalité et enchaîne les formations de la Mission locale ou de Pôle emploi qui, jusqu’ici, n’ont apporté aucun changement à sa situation. Elle persiste à dire que l’État « ne fait rien pour les jeunes qui ont surtout besoin d’être écoutés et aidés » .
Pour cette jeune maman, des solutions doivent être trouvées afin d’aider les jeunes qui réagissent en fonction de ce qu’ils vivent. Le bik a jénès est d’ailleurs « une chance pour elle de faire entendre sa voix pour l’avenir de ses enfants » .

STÉPHANIE, 23 ANS, BAIE-MAHAULT : « On a une Guadeloupe un peu fainéante »

À tout juste 23 ans, Stépanie est déjà à la tête de la société Andypdéco. Fille de restaurateurs qui organisent des banquets, elle baigne depuis toujours dans le milieu de l’événementiel. Après 2009, l’affaire familiale est placée en liquidation judiciaire, ce qui va conforter les choix d’orientation de Stéphanie. Après un bac STG Marketing, elle entame un BTS assistante de gestion qu’elle ne pourra pas terminer à cause de la charge de travail dûe à la création de son entreprise. Andypdéco est née de la volonté de maintenir l’héritage des 25 années de travail de ses parents. Avec son frère aîné, Gilbert, ils reprennent les rênes et organisent des réceptions, des mariages, des baptèmes. Stéphanie n’est pas comme ceux de sa génération qui « veulent tout facilement » . Selon elle, « on a une Guadeloupe un peu fainéante » . Malgré de nombreux déboires financiers du fait que les banques ne les suivent pas, Stéphanie ne se décourage pas : « Je ne baisse pas les bras car j’ai l’amour de mon métier. Je n’attends plus l’aide de personne, je me donne les moyens de mes ambitions. » Elle regrette de ne pas avoir eu le soutien de la Région mais reste focalisée sur les moments privilégiés qu’elle partage avec ses clients. L’essentiel est que ces moments restent des souvenirs inoubliables.

VINCENT, 24 ANS, SAINTE-ROSE : « Nonchalance et manque de rigueur »

Vacancier, Vincent profite de la maison familiale mais aussi d’un stage dans son île natale. Résidant actuellement en Belgique, il est resté en Guadeloupe jusqu’à sa 1re année de médecine, ne sachant pas véritablement ce qu’il voulait faire.
Une fois son projet de vie déterminé, il saisit sa chance en tentant les études de kinésithérapeute en Belgique. Après un premier échec lors d’un tirage au sort, il finit par accéder à une école au deuxième essai.
Vincent est en proie à un dilemme : regagner son île à l’issue de ses études ou poursuivre sa vie en Europe.
Le sérieux et le dynamisme qu’il a su trouver à l’étranger s’oppose « à la nonchalance et au manque de rigueur de la Guadeloupe » . Pour ces raisons, Vincent ne s’imagine pas vivre chez lui. Sa génération, portée sur les futilités, le déçoit : « elle manque d’un regard extérieur objectif, et la masse ne se démarque pas » . Vincent reconnaît toutefois l’existence de jeunes sérieux sur qui les autres devraient prendre exemple pour pouvoir changer et faire évoluer cette société.

AURÉLIE, 21 ANS, POINTE-NOIRE : « Les jeunes manquent de motivation »

Du haut de ses 21 ans et de son mètre 75, Aurélie voit les choses en grand. Elle est une étoile montante du mannequinnat. Miss Pointe-Noire puis miss Côte sous-le-Vent, Aurélie a été 3e dauphine à l’élection de miss Guadeloupe.
Ces premiers pas remarqués lui ont ouvert les portes de l’atelier de la styliste Éliette Superbe qui sera la première à la faire défiler. Le photographe Yvan Cymadure la conseille pour la démarche sur les podiums et le port de tête. Dans le même temps, elle valide sa licence de droit pour rassurer ses parents qui tiennent à ce qu’elle ait « un bagage » .
« Je me demande souvent comment j’ai fait pour concilier les deux, mais je l’ai fait! » Réaliser ses rêves étant important pour elle, elle prend un billet pour Paris où elle défilera quelques fois. Mais c’est à New York que la chance lui sourit. Elle y rencontre son agent qui arrive à la faire défiler pour la fashion week, la grand messe du monde de la mode. Elle enchaînera avec celle de Montréal avant de rentrer en Guadeloupe. « Il faut savoir se créer des opportunités. J’ai toujours été au devant des choses pour atteindre mes objectifs. Les jeunes d’aujourd’hui manquent de motivation et sont trop influençables. Beaucoup restent assis à attendre des aides, ils ne savent pas faire les bons choix lorsqu’ils se présentent à eux. » Elle compte bien faire un master de droit des affaires, tout en continuant sa carrière de top model.

Source : France antilles
http://www.guadeloupe.franceantilles.fr/actualite/societe/guadeloupe-une-jeunesse-a-deux-vitesses-226687.php

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