L’Afrique est bien le seul continent où les mains jointes, les yeux rivés sur l’écran, rivés sur chacune des élections présidentielles (aux États-Unis ou en France). Il se demande que fera-t-on de moi? Qui est le prochain bourreau? Qui est le prochain maître ? Une saga dont nous ne devrions pourtant pas accorder autant d’importance, au vu des défis et des problèmes que nous avons. Si le vote Africain comptait (particulièrement celui des francophones), si l’avis de l’Afrique pesait sur les enquêtes d’opinions en Occident, il suffirait à n’importe quel homme politique de faire une déclaration d’amour ou de désamour pour être élu. Mais hélas non, nous ne sommes pas pris en compte. Mais la question est très souvent posée, à chaque élection, aux différentes têtes d’affiche : que pensez-vous de l’Afrique ? Quelle politique pour l’Afrique par rapport à vos prédécesseurs ? Rassurez-vous la question est purement économique (spoliation ou semblant de partenariat équitable). Elle ne concerne pas les droits de l’homme ou le respect de nos institutions. Comme si nous n’étions qu’une simple province dont la particularité est d’avoir des habitants noirs, stupides et fainéants. Comme si nous n’étions qu’une quantité négligeable. À chaque tournée de recolonisation où déclaration tonitruante du plus petit ministre, les Africains s’agitent, débattent, en font une véritable polémique, comme s’ils valaient mieux que nos élus locaux. Il a bien choqué le discours de Nicolas Sarkozy à Dakar, celui de François Fillon, les différentes sorties de Jean-Marie le Pen sur l’Afrique et ses migrants et bien d’autres. Après plus de cinq décennies les termes indépendance et souveraineté passent mal. Le verdict est tombé, ce mercredi 9 novembre Donald J Trump est le 45e président des États-Unis. Quelle politique étrangère américaine, à fortiori pour l’Afrique ? Qu’adviendra-t-il de nous ? Que fera-t-il de l’Afrique : plus d’aides que ses prédécesseurs, ou bienveillamment songera-t-il à fermer ces fameuses AFRICOM (Bases militaires Américaines en Afrique) ?
Ce à quoi peu s’attendaient ou redoutaient est arrivée : Trump est président ! On aurait pour certain préféré une Hilary Clinton plus conciliante, fourbe, froide et calculatrice. Hilary Clinton, qui a largement contribué à la déstabilisation de la Libye en 2011 et qui s’est elle-même lavée de toutes responsabilités dans ses mémoires « Hard Choices », en mettant tout le poids de cette guerre impérialiste sous la responsabilité de Sarkozy. Mais hélas non, « l’impensable est politiquement possible » disait J.P Raffarin. Après David Palmer on s’attendait bien à une Allison Taylor comme dans la série culte américaine « 24h chrono », à la place on a eu droit à un Patrice Talon doublé d’un Robert Mugabe. Faut-il réellement avoir peur de celui qui déclarait au cours d’un meeting : « certains Africains sont des sots paresseux, tout juste bons à manger, faire l’amour et voler » ? Non, voilà 3 raisons :
1) Le système américain, bien qu’il soit réputé pour produire des marionnettes, des politiques à la solde des lobbies, de la finance et des grands groupes. un système qui promeut très souvent des populistes qui finissent par diluer leurs promesses au détriment d’un pseudo « pragmatisme ». Andrew Jackson a échoué, Trump finira peut-être par s’essouffler face à la finance. Une chose est sûre, c’est que cette nouvelle leçon de démocratie de l’Uncle Sam » se doit en Afrique de sonner le glas : de la démocratie représentative, du parti de masse et des partis politiques traditionnels, donc de l’ »Establishement », au détriment d’une véritable souveraineté populaire.
2) L’électorat de M. Trump est très fortement composé de ce qu’on appelle « l’Américain blanc en colère », colère dirige contre les délocalisations vers le Mexique, la Chine, le Japon suite aux traites de libre-échange. L’Afrique n’est donc pas une menace directe pour ses électeurs. L’Afrique ne sert qu’à justifier la désastreuse politique étrangère de ses prédécesseurs en Egypte et surtout en Libye.
3) Le partisan du « America First », en dépit d’une communauté noire qui lui est pourtant hostile (4% d’électeurs noirs contre 92% pour Clinton selon le sondage du 1er septembre de Sulfok University/Usa today), se sent toutefois plus proche de la communauté noire américaine que de l’Afrique. Une communauté dont il se vante d’avoir de bonnes relations : « je n’ai pas un os de racisme dans mon corps », « les Afro-américains m’adorent ». Durant toute sa campagne il s’est voulu défenseur de la cause noire en promettant de faire plus que ses prédécesseurs. Il s’est même prononcé sur les violences policières exercées sur cette communauté. À Philadelphie, il lance sur les manifestations en Caroline du Nord « ces émeutes qui menacent les citoyens pacifiques doivent prendre fin maintenant. Les principales victimes de ces manifestations sont les Afro-Américains qui respectent la loi, qui veulent éduquer leurs enfants en paix ». Pour celui qui a du mal à prononcer « Tanzanie » l’Afrique n’est qu’un vaste terrain vague sur lequel ses fils peuvent aller faire du safari, un stand de tir où la négociation avec un Somalien qui s’en prend à un citoyen américain est proscrite.
Avec Trump on sait à quoi s’attendre. C’est le retour à la politique isolationniste des États-Unis : « pas de malade d’Ebola aux États-Unis », « pas de migrants nous avons déjà nos problèmes ». In fine, Trump ce n’est pas la fin des violences policières mais « c’est du chacun chez soi, chacun pour soi et Dieu nous pousse ». Le monde nous envoie des signaux, il est temps que nous prenions soin de nous-mêmes, à notre place, personne ne le fera.
NegroNews
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