Voilà maintenant neuf mois que les violences meurtrières ont eu lieu au Gabon, après le scrutin des élections présidentielles du 27 août dernier. Dans un élan de transparence et de justice, l’ex-ministre de la justice, avait initié une démarche auprès de la CPI, afin qu’une enquête soit ouverte et apporte des réponses aux interrogations de la communauté gabonaise. Du 20 au 22 juin 2017, une mission de la CPI siégera à Libreville afin de mener cette enquête.
UN PAS VERS LA VÉRITÉ SUR LES VIOLENCES POST-ÉLECTORALES ?
Après le scrutin d’août 2016, qui a donné Ali Bongo Ondimba, le président sortant, vainqueur de l’élection présidentielle, des violences inédites, pour ce pays réputé être « le pays de la paix », ont eu lieu dans plusieurs grandes villes. À Libreville, le peuple a marché contre les résultats du scrutin, détruisant au passage de nombreux symboles de la République, tel que l’Assemblée nationale, qui a été incendiée. À port-Gentil, le secteur pétrolier, premier dans l’économie du pays, a cessé son activité pendant une longue période, à l’instar de nombreuses autres entreprises. Dans la diaspora, partout des marches de protestation étaient régulièrement organisées.
En effet, le grand banditisme semblait s’être déclaré au Gabon. La police était en alerte. Des centaines de personnes avaient été arrêtées début septembre, 407 avaient été relâchées, 393 déférées au parquet de Libreville et 31 incarcérées, avait indiqué le procureur. Au vu de toutes ces réactions et surtout des nombreux témoignages de torture, de visions d’horreur et de scènes de crimes, qui n’ont cessé d’alimenter la toile, l’ancienne ministre de la Justice, Denise Mekam’ne avait alors initié une démarche auprès de la Cour Pénale Internationale (CPI), parce que pour elle, « Il est important qu’on sache que ce qui s’est passé au Gabon est inacceptable (…) nous ne faisons pas de petits calculs politiques. Nous avons la conviction que nous devons défendre la liberté et la démocratie », avait-elle alors déclaré justifiant ainsi sa démarche.
UN POINT SUR LEQUEL L’OPPOSITION ET LE POUVOIR EN PLACE SONT D’ACCORD.
Voilà bien, un point sur lequel les deux camps semblent être d’accord, mais pas pour les mêmes raisons, on s’en doute bien. En effet, l’opposition avait d’ores et déjà saisi la CPI pour ouvrir une enquête sur les violences post-électorales, lesquelles auraient fait plus de cent (100) morts, dont un groupe armé du pouvoir baptisé « Escadrons de la mort » seraient responsable. « Une enquête de la CPI sur les violences au Gabon, c’est ce que tout le monde entier demande. On ne demande pas autre chose. On ne va pas continuer à massacrer des personnes innocentes simplement parce qu’elles sont dans la rue pour réclamer la vérité », avait déclaré Maître Jean-Rémy Bantsantsa, un avocat de Jean Ping.
Et voilà que de son côté, le pouvoir en place montre Jean Ping du doigt par rapport à ces mêmes violences, qui ont fait officiellement trois (3) morts. Dans la plainte qui le concerne, Denise Mekam’ne atteste que « les propos tenus par monsieur Jean Ping à l’occasion d’un meeting constituent une incitation au crime de génocide » et donc … Condamnables. À réception de cette plainte, Fatou Bensouda a réagi par le biais d’un communiqué « Mon bureau procédera à un examen préliminaire de la situation afin de déterminer si les critères imposés pour l’ouverture d’une enquête sont réunis », en réponse à la requête du gouvernement, datant du 21 septembre dernier, de « bien vouloir ouvrir sans délai une enquête ».
Tous peuvent désormais se réjouir, car c’est dans six (6) jours que la mission de la CPI débarquera à Libreville, pour tenter de mettre de la lumière sur les 48 heurs les plus sanglantes de l’histoire du pays. Au cours de son séjour dans la capitale gabonaise, la délégation de la CPI va rencontrer les autorités de la Justice, de la Défense, de l’Intérieur, des membres de la société civile, des missions diplomatiques ainsi que des journalistes, rapportent des médias locaux. Elle examinera tous les éléments disponibles à l’enquête, afin de juger si leur gravité nécessite ou non l’ouverture d’une enquête qui sert les intérêts de la justice.
ÇA VEUT DIRE QUE LE GABON N’EST PAS POUR LE « RETRAIT COLLECTIF » DE LA CPI ?
Rien n’est moins sûr ! Au début de l’année 2017, au cours d’un sommet qui réunissait les États membre de l’Union Africaine, la question du « retrait collectif » des États africains de l’institution a été évoquée. Et c’est pendant une réunion, tenue à huis clos, lors du dernier sommet d’Addis-Abeba qui s’est achevé le 31 janvier, les chefs d’État africains ont entériné le principe d’un retrait collectif du statut de Rome dont la ratification permet l’adhésion à la Cour Pénale Internationale (CPI). Malgré la réticence de plusieurs pays comme le Sénégal, la Tunisie, la Malawi, la Zambie, la Tanzanie, le Nigeria et le Cap-Vert.
En effet, une mauvaise réputation précède la Cour dans les pays africains. Elle est décrite comme étant « l’instrument e l’Occident », pour mettre l’Afrique à ses pieds. Malgré cela, ce sont au total, 123 États, dont le Gabon, ont à ce jour adhéré au statut de Rome, traité fondateur de la Cour. Des examens préliminaires ont pour l’instant été ouverts en Afghanistan, en Colombie, en Guinée, en Irak, au Nigeria, en Palestine, en Ukraine et récemment au Burundi. Attendons désormais les conclusions de cette enquête plus qu’imminente.
NegroNews
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