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LADJ LY ÉMEUT LE JURY DE CANNES AVEC « LES MISÉRABLES »

Le réalisateur français d’origine malienne, Ladj Ly, a décroché samedi, avec son film ‘’Les Misérables’’, le prix du jury au 72è Festival de Cannes. Le film tourné dans la cité des Bosquets à Montfermeil et traitant des violences policières est un « cri d’alarme » à l’attention du président Macron.

Loin d’être un film “anti-flics”

Comme le fait remarquer le Huffigton Post, le long-métrage engagé de Ladj Ly avait eu droit à une standing ovation après sa projection dans le Grand théâtre Lumière le mercredi 15 mai. Et pour cause : le film pointe du doigt le problème social actuel, celui des violences policières. Dans “Les Misérables”, adapté d’un court-métrage du même nom et nommé aux César en 2018, Ladj Ly dépeint avec réalisme et authenticité une bavure policière en banlieue. Alors qu’il est interpellé pour avoir volé un lionceau aux “gitans” du cirque voisin, un jeune garçon est la cible d’un tir de flash-ball par un membre de la BAC. La scène, filmée par hasard par le drone d’un jeune de la cité, va avoir des conséquences désastreuses pour tous.

« La France a l’air de découvrir que la police est violente », lance Ladj Ly. « Mais nous ça fait 20 ans qu’on est gilets jaunes, qu’on revendique nos droits et qu’on nous fait passer pour des racailles, pour des casseurs ». Lui qui, il y a dix ans déjà, dégainait sa caméra pour faire du “copwatching”, ne modère pas sa colère : « Aujourd’hui, on voit toutes ces images de violences policières, il y a des dizaines et des dizaines de personnes éborgnées, des blessés graves, des mutilés de guerre… Et pourtant, il ne se passe rien, il n’y a pas de justice pour ça. C’est scandaleux ce qu’il se passe en France ! »

Mais “Les Misérables” est loin d’être un film “anti-flics”. Au contraire. Avec sa caméra, Ladj Ly parvient à déclencher chez le spectateur de l’empathie pour ces trois policiers sous pression, complètement dépassés par les événements.

« Nous, on veut des policiers compétents et formés, pas des gens qui sortent d’une école de province et qu’on jette dans nos banlieues », revendique-t-il. « Quand le mec est dépassé, qu’il travaille avec la peur au ventre, ça ne peut que partir en vrille. Les flics aussi, ce sont les Misérables ».

Marcon interpellé

Mais plutôt que de rendre les policiers responsables, Ladj Ly pointe du doigt le rôle des politiques. « C’est à eux qu’on jette la pierre. Et c’est à eux de trouver des solutions », invective le réalisateur, « mais ils n’en ont rien à foutre ». « Regardez Macron, il a lancé le ‘Plan banlieue’, il a invité tous les gens qu’il fallait, et puis la veille… il annule. C’est vous dire le mépris total qu’il a pour nous ».

C’est au centre de loisirs Hergé, dans la cité, que Ladj Ly rencontre pendant les vacances le futur cinéaste Kim Chapiron (fils de l’artiste Kiki Picasso) dont les grands-parents vivent dans le quartier. Amad, frère cadet de Ladj Ly, 39 ans, se souvient que leur père préférait payer plus cher pour aller dans ce centre, qui accueillait surtout les enfants des pavillons et qu’il pensait « plus cadré ». Le collectif Kourtrajmé (court métrage à l’envers) allait naître de cette amitié.

Ladj Ly l’a redit à Cannes : le film qui lui a donné envie de faire du cinéma, c’est « la Haine », de Mathieu Kassovitz. Il avait 15 ans et allait faire ses premiers pas derrière une petite caméra, qui s’ouvrait sur le côté, façon caméscope. Il filmait tout ce qu’il se passait dans son quartier. « Nos parents ne comprenaient pas, ils pensaient qu’il allait filmer des mariages », se souvient encore Amad.

« Nous sommes prêts à une projection à l’Elysée »

Ce samedi soir, après avoir reçu le prix jury ex-aequo, ce membre actif du collectif Kourtrajmé a révélé aux journalistes qu’il avait été contacté par l’entourage du chef de l’Etat et qu’il allait organiser une projection pour lui, « à l’Elysée ou ailleurs ». Interprété par Damien Bonnard, Alexis Manenti et Djebril Didier Zonga, « Les Misérables » n’a pas encore de date de sortie en salles. Mais ses droits ont d’ores et déjà été achetés par TF1 et TMC qui en proposeront la première diffusion en clair.

« Le film est un cri d’alerte et parle de la place de l’enfance dans ces quartiers difficiles. L’école, cela devient une catastrophe », avait notamment déclaré Ladj Ly le 16 mai dernier en conférence de presse. « Cela fait plus de vingt ans que l’on est ‘’gilets jaunes’’, que l’on est confronté à des violences policières, à des tirs de flashball dans la gueule. Aujourd’hui, la France découvre que les LBD sont dangereux (…) Nous sommes prêts à une projection à l’Elysée ». Une affaire à suivre.

NN

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