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[ACTUALITÉ] UNE CINÉASTE SÉNÉGALAISE FILME DES CONGOLAIS VICTIMES DE VIOLENCES

La réalisatrice sénégalaise Angèle Diabang sort Congo, un médecin pour sauver les femmes. Un documentaire poignant sur le travail du Dr Denis Mukwege, récompensé en octobre par le prix Sakharov pour son aide aux femmes violées dans l’est de la République démocratique du Congo. Productrice basée à Dakar, sensible aux thématiques liées à la femme, elle va aussi porter à l’écran Une si longue lettre, le roman de Mariama Bâ.

Angèle Diabang, 35 ans, parle avec douceur de sujets graves. Son premier documentaire,Mon beau sourire, évoquait en 2005 la souffrance que certaines s’infligent pour se faire tatouer les gencives en noir, un critère de beauté au Sénégal. En 2007, avec Sénégalaises et islam, elle donnait la parole à des femmes qui vivent de manières très différentes la même religion…

D’un naturel plutôt réservé et modeste, elle ne se pose pas en militante de la cause féministe, mais propose plutôt un regard sensible sur des questions de femmes. Son objectif : faire réfléchir en donnant à voir.

Un documentaire sensible sur un sujet difficile

C’est la mission que se fixe son dernier documentaire sur le célèbre chirurgien congolais Denis Mukwege. Le médecin a ouvert une clinique à Bukavu en 1999 pour venir en aide aux femmes victimes de violences sexuelles. « J’écoutais en mangeant ces informations horribles sur la RDC et je zappais, comme tout le monde, raconte Angèle Diabang. Un jour, je me suis demandé ce que je faisais pour ces femmes et pour mon Afrique. Je suis allée faire ce film. » Elle a tourné en janvier 2013 et janvier 2014 à Bukavu, recueillant les témoignages du médecin, de son personnel et de ces nombreuses victimes de viols collectifs, de très jeunes femmes parfois tombées enceintes, rejetées par leurs familles et leur communauté, et qui savent qu’elles n’auront pas « la force » d’aimer leur enfant.

On y voit un bref instant le Dr Mukwege et son équipe reconstituer le périnée déchiré d’une femme violée au bloc opératoire. Un bref instant seulement… Si ce film est réussi, c’est parce qu’il pose un regard sensible et ne donne pas dans le sensationnel. Il ne prend pas non plus le parti de se focaliser sur la personne du médecin, un homme qui dérange à cause de son discours sur l’état de sa société, et qui a échappé à trois tentatives d’assassinat. Le docteur n’est présent qu’en pointillés, même si sa force de caractère et son humanité auraient pu faire un sujet à part entière. L’une des scènes les plus saisissantes du film le montre en train de prier à l’église, au milieu d’un chœur vibrant d’espoir.

Mais la caméra s’attarde plutôt en gros plans sur les visages des femmes. Elle s’intéresse au travail psychologique qui se joue aussi dans la clinique Panzi, qui a déjà traité 40 000 femmes en quinze ans. Et revient sur les causes du viol à grande échelle, devenu une arme de guerre.

Productrice à Dakar

Formée à l’école de cinéma de la Femis à Paris et en Allemagne, Angèle Diabang se décrit comme une « réalisatrice fragile ». Elle raconte avec pudeur que « le Dr Mukwege et sa femme étaient là pour me remonter, quand je n’avais plus l’énergie de tourner à Bukavu ». Elle se dit « à l’aise dans la production, moins en danger parce que ce n’est pas moi qu’on regarde ». Elle sait à quelles portes frapper pour trouver les financements, les accords de co-production et aider les autres à réaliser leur rêve.

Karoninka, sa maison de production basée à Dakar, a déjà à son actif une douzaine de films. Parmi ses projets en cours, figure Les Pagneuses, un documentaire de Gentille Assih sur les fameuses Nana Benz au Togo, des femmes qui ont fait fortune en vendant des imprimés wax. Elle participe aussi, avec les Films du Paquebot, au prochain documentaire du cinéaste congolais Léandre-Alain Baker, auteur de Ramata en 2007 avec Katoucha Niane. Dans Yolande ou les blessures du silence, il brosse le portrait d’une rescapée du génocide des Tutsis au Rwanda.

Une si longue lettre, d’après le roman de Mariama Bâ

Enfin, le tournage du premier long-métrage de fiction d’Angèle Diabang est prévu pour la fin 2015. Elle va adapter Une si longue lettre, un grand classique de la littérature africaine. Paru en 1979 au Sénégal et étudié depuis par les collégiens d’Afrique de l’Ouest, ce roman de Mariama Bâ n’a pas pris une ride. Le thème de la polygamie reste d’actualité, plus que jamais, au Sénégal.

« J’ai eu envie d’adapter ce roman autobiographique parce qu’il m’a beaucoup marquée. Mariama Bâ travaillait, elle avait des enfants et son mari a pris une seconde femme. Etait-ce de sa faute ? Parce qu’elle a voulu être moderne et avoir une vie professionnelle malgré sa dizaine d’enfants ? C’est très difficile pour certaines de mener de front ces deux vies que sont le travail et le foyer. Les hommes ne s’en rendent pas compte… »

Ce film, qui a déjà des soutiens et un producteur français, Eric Nevé, devrait être le premier volet d’une série de longs métrages tirés de romans de femmes. Angèle Diabang veut aussi porter à l’écran La nuit est tombée sur Dakar (Grasset, 2004) de la Sénégalaise Aminata Zaaria. Le rêve brisé de deux jeunes filles de Thiès, parties à Dakar pour conquérir des hommes blancs, dans l’espoir qu’ils leur servent de passeport pour l’Europe.

 

Source: http://www.rfi.fr/hebdo/20141121-cinema-senegal-angele-diabang-rdc-congo-violences-sexuelles-femmes-viols-mukwege/

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