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[SOCIÉTÉ] INCLUSION DES NOIRS EN COLOMBIE, BEAUCOUP DE BRUITS POUR RIEN !

Ou comment de nous déclarer un État “pluriethnique et multiculturel” dans la Constitution de 1991 a plus servi au bien-être d’une poignée –  d’“afroprivilégiés” et  “’afro-fonctionnaires”, qu’à l’inclusion effective des afrocolombiens. 

 

Les “afro-privilegiés”

En Colombie, on a l’impression qu’enfin, l’État s’occupe des personnes d’ascendance africaine et que les brèches qui séparent les personnes noires, afrocolombiennes, raizales et des palenques du reste de la population sont en train de se fermer avec célérité.

Il n y a rien de plus loin que la vérité : un bon nombre de progrès ont en effet été réalisés, mais leur portée n’a été que superficielle.

Une portion du monde afrocolombien pense que l’intégration souhaitée à la nation, dans les termes imposés par l’establishment, est une réalité. Ils affirment qu’au jour d’aujourd’hui, la citoyenneté universaliste et libérale s’étend à tous les afrodescendants, dont l’histoire d’esclavisation, la couleur ou le phénotype noir ne les affecte plus.

Les possibilités d’ascencion sociale pour ce groupe paraissent évidents : les uns sont appellés à occuper des fonctions publiques hautes ou moyennes dans le gouvernement national ou dans les administrations locales, et d’autres résident dans les quartiers où ne vont pas d’autres noirs. Leur vie semblerait s’écouler dans un monde de tendre innocence en matière de relations socio-raciales.

Ceux-là font partie du groupe des “afro-privilégiés”, usufruitiers du travail et des luttes de revendication sociale et juridique menées par une myriade d’activistes depuis plusieurs décennies.

Mais les hommes et les femmes de ce groupe manifestent un rejet ouvert, quand ce n’est pas du mépris, envers ceux qui ont rendu possible leur propre ascencion. Et surtout, ils établissent une barrière sociale et culturelle entre eux et ceux qu’on appelle les campagnards, c’est-à-dire, les noirs qui marchent à pieds, particulièrement ceux d’origine rurale.

La majorité des afro-privilégiés ont renié leurs origines – et ont rompu avec les cultures noires, avec leurs territoires, avec les luttes de leurs peuples pour la dignité et l’humanité depuis l’arrivée dans les embarcations esclavagistes. Ils refusent de se reconnaitre comme partie de la communauté historique constituée par la diaspora africaine sur tout le globe.

Et cependant – même si le commun de la population noire ne le sait pas- c’est sur ces privilégiés que reposerait la responsabilité de convertir en réalité l’abondante législation ethnique qui a suivi la Constitution de 91 et qui vise à créer les conditions pour que l’égalité devienne effective.

Certains parmi eux acceptent des charges de direction d’institutions publiques imprégnées de racisme et s’occupent d’appliquer l’énigmatique  “approche différentielle ethnico-raciale ” sans avoir la moindre idée du projet de nation plutriethnique et multiculturelle tracé depuis 22 ans par la Constitution, en ignorant particulièrement la Loi 70 de 1993 et la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail  (OIT).

Les membres de ce groupe ne trouvent aucune contradiction entre le fait d’être appellés à occuper des fonctions publiques en tant que quotas de groupes historiquement marginalisés et leur conviction d’être des citoyens universalistes, et par conséquent, insensibles à l’impact du racisme et de la discrimination dans la vie quotidienne de millions de personnes noires.

C’est ce qui explique que, plus que d’être les garants ou exécutants de l’approche différentielle, les privilégiés sont ses principaux obstructeurs.

Idiots utiles

sandra mosquera inclusion afrodescendientes ayuda humanitariaFoto: European Comission DG ECHO- Punto de ayuda humanitaria de la Comisión Europea.

Les gouvernements préfèrent employer ce type de personnes, car de manière implicite, on les charge de maintenir intactes les relations raciales, une tache qu’ils accomplissent avec dévotion et professionnalisme.

Dans ce sens, je m’écarte des critiques qui dénoncent la présence de tant  “d’afro-fonctionnaires. En réalité, ils sont peu, mais du fait d’un effet magico-politique, ils paraissent bien plus nombreux.

Le problème vient du fait que ces “fonctionnaires afros” représentent  très rarement les intérêts des majorités noires, ne tiennet pas compte des agendas poliques et internationaux, et accpetent de travailler sans budgets importants pour faire avancer des projets d’envergure et d’impact.

Tout cela, ajouté à leur manque d’intérêt de connaitre les barrières qui empêchent la jouissance effective de droits individuels et collectifs  des descendants d’africains dans le pays, transforme  l’inclusion sociale en un mirage.

Mais en plus, dans de nombreuses institutions de l’État,  les affaires noires,  raizales et des palenques sont pris en charge par des fonctionnaires inefficients ou très mauvais professionnels, dont le seul mérite est celui d’être recommancdés par des caciques politiques. C’est ce qui explique que la citoyenneté -tant universelle que différentielle-des noirs reste remise en doute.

La locomotive législative pour l’inclusion sociale, constituée par des plans de développement, les lois, les ordonnances et les accords , avance sans des opérateurs engagés pour la mener dans un endroit sûr et et sans un mouvement social noir qui en fasse le contrôle et  consacre à cet exercice ses meilleurs cadres professionnels.

Il existe sans doute également une petite élite d’excellents “afro-fonctionnaires”, que bien évidemment je ne critique pas dans ces écrits. Pour changer les relations de pouvoir dans l’État, il faut des mesures d’inclusion comme les actions affirmatives qui permettent l’accès massif de professionnels noirs compétents à tous les niveaux de l’administration publique.

La réponse du gouvernement.

En lançant le Troisième Sommet Mondial des Maires et des Dirigeants Afrodescendants le 12 septembre dernier, le président  Santos a tenté d’une autre façon d’escamoter son engagement pour l’inclusion des afrocolombiens , en présentant les ministres Amilkar Acosta Medina et  Alfonso Gómez Méndez comme des bénéficiaires des quotas en faveur des peuples noirs, alors qu’en réalité ils sont des autorités du Parti Libéral.

Par contre, le vice-président Angelino Garzón est la personnalité au sein du gouvernement qui montre le plus d’intérêt et d’engagement envers les peuples noirs, suivi par la ministre Mariana Garcés qui est en train de développer l’agenda afro-culturel. La Loi de l’égalité des Opportunités que le Ministère de l’Intérieur est en train d’élaborer depuis cinq ans est une autre initiative prometteuse. Le Directeur du Programme Présidentiel pour la formulation de stratégies et d’actions pour le développement intégral de la population afrocolombienne, noire, des palenques et raizal, Oscar Gamboa Zúñiga, fait ce qu’il peut dans la marge très étroite dont il dispose.

Le rôle de la “coopération internationale”

sandra mosquera inclusion afrodescendientes ong chocoFoto: Gatzteaukera- ONG Pies Descalzos.

Beaucoup s’imaginent qu’il y a à disposition d’abondantes ressources internationales pour le développement social, économique et politique des noirs et que les organisations ethniques, ethnico-territoriales jouissent donc d’une aisance financière.  Mais cette appréciation est incorrecte et injuste.

Ce qui par contre mérite un débat public c’est le rôle de la coopération ethnique internationale, car autant son très faible impact sur les communautés présumément bénéficiaires que les bisbilles qu’elle a semées entre les organisations de bases pour des  montants dérisoires sont simplement alarmants.

Au nom des noirs, la coopération internationale emploie un bon nombre de professionnels métiss, bilingues, défenseurs des intérêts économiques et idéologiques des États-Unis ou de quelconque autre pays de l’Union Européenne. Paradoxalement, ce sont les peuples noirs victimes qui sont les employeurs d’étrangers avec des prétentions ethno-centriques qui avaient des problèmes d’emploi dans leurs pays d’origine:

-Un exemple de cela fut la nuisible promotion de la culture de la palme africaine sur des territoires collectifs par l’Agence des États-Unis pour le Développement International (USAID en Anglais).

-Autre peuve, avec l’opérateur douteux du nom  ACDI/VOCA, qui a reçu une bonne partie de l’argent devant être investi dans des projets d’inclusion ethnique, mais n’en redistribue qu’une portion et le fait à des personnes ou des organisations proches de l’idéologie du métissage triethnique ; qui parlent du racisme sans les personnes qui le subissent et qui organisent des ateliers, des séminaires et des congrès tapageurs.

Dans le même temps, l’Association Nationale des Maires de Municipalités avec une Population d’Afrodescendants (AMUNAFRO), la puissante organisation qui a fait les démarches pour obtenir ces ressources pour l’ ACDI/VOCA ne dispose même pas de son propre siège.

Encore le racisme

Le troisième Sommet Mondial qui a connu un grand succès et qui s’est tenu entre le 12 et le 18 septembre à Cali et à Cartagena -deux villes noires emblématiques –  nous a invité à réfléchir dans une perspective globale sur la thématique toujours passionnante du développement économique de l’Afrique et des peuples de la diaspora africaine.

On pense généralement que la marginalisation et la discrimination diminuent à mesure que davantage de personnes, familles et peuples jouissent des avantages du développement économique libéral, qu’ils accèdent au pouvoir du vote ou qu’ils occupent des positions dans l’État à partir desquelles ils pourraient défendre les intérêts ethnico-raciaux .

Cette vision met cependant l’accent sur la composante de la mobilité sociale individuelle ou de petits groupes, sans signaler que le racisme et la discrimination raciale sont au centre même du système économique capitaliste, qui profite d’eux et de leur relation avec d’autres systèmes d’oppression basés sur le genre, l’option sexuelle, l’âge ou le territoire avec des ressources naturelles.

Tant qu’on ne reconnait pas la centralité du racisme et de la discrimination raciale, la thématique de l’inclusion peut tomber dans le contresens judicieusement signalé par la ministre brésilienne Luiza Bairros lors de sa visite en Colombie: la promotion sociale ne garantit pas que le racisme diminue, mais qu’il peut soumettre les hommes et les femmes qui réussissent d’un point de vue économique  à de nouveaux et sophistiqués harcèlements raciaux.

Claudia Mosquera RazonPublica

Par Claudia Mosquera Rosero- Labbé

*Directrice du Groupe Idcarán, Centre des Études Sociales, Université Nacional de Colombie.

Traduit de l’Espagnol par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com

 

http://www.razonpublica.com/index.php/econom-y-sociedad-temas-29/7102-inclusion-de-la-gente-negra-en-colombia-mucho-ruido-y-pocas-nueces.html

source : http://guyzoducamer.afrikblog.com

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