Le Rwanda siège depuis le 1er Janvier 2013 au conseil de sécurité des Nations Unis en tant qu’un des trois pays africains membre non permanent, pour une durée de deux ans.
Un choix embarrassant, selon Pascal Boniface, directeur de l’Iris, qui rappelle que ce pays est suspecté de soutenir les rebelles qui sévissent dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).
Le Rwanda participera donc à l’organe suprême des Nations unies pour ce qui est du maintien de la paix et de la sécurité collective.
Le problème est que le pompier est également pyromane.
Certes, les cinq membres permanents ne sont pas tous et toujours les mieux placés pour donner des leçons en matière de défense et de promotion de la sécurité collective. Ils ont souvent abusé de leur statut de puissance pour se lancer dans des opérations militaires en dehors de toute légalité ou pour protéger leurs alliés qui violaient le droit international.
Un soutien de la rébellion congolaise
Ce qui est gênant dans le cas du Rwanda, c’est que la consécration que représente l’élection comme État membre non permanent du conseil de sécurité survient au moment où ce pays est largement mis en cause pour ce qui se passe en République démocratique du Congo (RDC) et notamment au Kivu.
Après le génocide de 1994, des centaines de milliers de Hutus se sont réfugiés dans cette région. Certains étaient des civils innocents, d’autres étaient des génocidaires. Certains par peur de représailles de la part de Paul Kagame, le président Tutsi du Rwanda, et d’autres, dans l’espoir de reconquérir militairement le pays.
Cela a entraîné une intervention de l’armée rwandaise pour empêcher cette option militaire. Mais l’intervention a aussi permis au Rwanda de profiter des immenses richesses géologiques du pays. D’autres voisins s’en sont mêlés provoquant ce que l’on a appelé la « première guerre mondiale africaine » qui a fait près de 4 millions de morts. Dans une assez grande indifférence.
L’ONU a déployé une force après le cessez-le-feu de 2003. Avec 17.000 hommes, c’est la force de maintien de la paix la plus importante mise en place. Mais les combats ont repris de façon sporadique. Les civils payent le prix à la fois de mouvements rebelles soutenus par le Rwanda – qui entend toujours profiter des richesses minières de la RDC – et d’une armée congolaise qui s’en prend régulièrement à une population qu’elle est censée protéger.
Des récits qui glacent le sang
De nombreuses ONG humanitaires et de défense des droits de l’Homme et des personnalités ont lancé un appel pour muscler la MONUSCO (force de l’ONU) afin qu’elle joue un rôle plus efficace.
Il faudrait surtout que le Rwanda cesse d’appuyer le M23. Ce mouvement est régulièrement mis en cause pour une politique massive de viols, de recrutement forcé d’enfants soldats et d’exactions diverses sur la population. Les récits qu’on peut en lire glacent le sang.
Dans une tribune publiée dans l’ »International Herald Tribune » du 29 decembre, Philippe Bolopion, directeur de l’ONG Human Right Watch auprès des Nations unies, estime que même selon des critères congolais le M23 à un bilan effrayant.
Or l’armée rwandaise lui fournit des armes, des munitions et des centaines de jeunes recrues lorsqu’il n’envoie pas ses propres troupes. Un rapport des Nations unies met même en cause le ministre de la défense du Rwanda dans une opération qui a eu pour cible une base des Nations unies en RDC.
Le génocide dont le Rwanda a été victime, ses remarquables performances en termes de développement économique, ne doivent pas lui garantir une impunité pour les crimes de masse dont il a été trop longtemps complice en RDC.
Source : Le Nouvel Observateur
Image d’illustration : Le président rwandais, Paul KAGAME et l’ambassadeur Eugène Richard Gasana, 50 ans, qui représente le Rwanda à l’ONU, et qui siège au nom du groupe Afrique au conseil de sécurité.
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