La langue est un élément d’unité et de cohésion d’un peuple. L’État fédéral à venir devra posséder une langue qui permettra à tous les Africains de se comprendre et de se concevoir comme appartenant à une même entité. Quelques locutions ont vocation à jouer ce rôle. On peut citer le Haoussa qui est parlé au Nigéria, au Niger et au Cameroun notamment. Le kiKongo et le Lingala qui sont parlés en RDC, au Congo-Brazza et en Angola. Personnellement et pour des raisons objectives, j’opte comme Cheikh Anta Diop pour le Swahili.
Pour anecdote – je la répète de mémoire – lors des indépendances, les partisans de l’unité africaine se sont retrouvés au cours d’une réunion. Les francophones et les anglophones n’arrivant pas à se comprendre, Patrice Lumumba et Julius Nyerere tous 2 swahiliphones ont joué les interprètes. Les francophones parlaient et Lumumba traduisait en Swahili pour que Nyerere répète en anglais et vice-versa. Le Swahili a donc servi de langue de travail aux indépendances et Kwame Nkrumah l’a retenu comme possible langue de son Afrique unie rêvée.
Le Swahili, langue purement nègre, est la langue maternelle du petit peuple des Waswahili en Tanzanie. Elle est parlée en Tanzanie, au Kenya, en RDC, en Ouganda, au Rwanda, au Burundi, aux Comores, en Somalie, au Mozambique, Madagascar et en Zambie. Elle est utilisée quotidiennement par 100 millions d’africains, ce qui en fait la langue noire la plus parlée. Elle est la langue de communication de l’Afrique de l’est mais est surtout la langue officielle de la Tanzanie. C’est la seule langue noire qui soit langue de gouvernement d’un état et langue de travail à l’Union Africaine.
Julius Nyerere qui n’était pourtant pas Waswahili, en tant que président de la Tanzanie, en a fait une langue forte. Les cadres politiques et techniques étaient forcés de l’utiliser, des ouvrages importants y ont été traduits, ce qui a permis de l’enrichir. Le Swahili est enfin la seule langue noire sur les moteurs de traduction d’internet.
Le Swahili a donc l’avantage, au-delà de son étendue, d’être appuyée par une puissance publique, ce qui est primordial pour l’épanouissement d’une langue. La province canadienne du Québec est francophone, et entourée de toute part d’anglophones qu’elle est, défend vaillamment le français. Il y a ainsi un institut chargé de traduire tous les mots nouveaux en français. Il y a donc peu d’anglicisme et la langue évolue avec la technologie. Podcast s’y dit « balladiffusion » et faire du shopping s’y dit « magasinner ». De la même manière, un institut africain si ce n’est déjà le cas doit pouvoir jouer ce rôle pour le Swahili afin de limiter la dénaturation de la langue.
Les expressions scientifiques, à l’exemple des langues européennes avec le grec et le latin, pourraient prendre leurs sources dans l’égyptien ancien, en s’appuyant sur la philosophie ancestrale.
La question est, qu’est-ce que nous en ce moment pouvons faire pour développer le Swahili ? D’abord il faut l’apprendre, il y a des livres. J’étudie l’égyptien ancien depuis quelques mois à partir de livres et je parviens à composer des phrases entières dans cette langue, ce n’est donc pas difficile. Si vous pouvez intégrer dans votre cursus un voyage en Tanzanie pour apprendre le Swahili, c’est encore mieux.
Pour ceux qui ne le font pas dans leurs langues, plutôt que d’écrire des chansons en français ou en anglais, pourquoi ne pas écrire des chansons en Swahili pour les musiciens ? La musique américaine a déferlé dans mon pays il y a une dizaine d’année et l’envie de comprendre les paroles a donné des bases en anglais à ma génération. La langue doit également servir dans la littérature et la connaissance en général. Le seul livre qui existe dans ma langue est la bible, je me vois donc obliger si je veux accéder à la connaissance de passer par les langues européennes. Un livre comme Nations Nègre et Culture doit être traduit en Swahili et la BD, les romans, les sciences et la communication doivent être faits dans cette langue. Nous n’aurons ainsi fait plus à dépendre de livres en français ou en anglais pour étudier la médecine ou les mathématiques.
Pour être clair, je ne suggère à personne d’abandonner sa langue pour le Swahili. Chacun pourrait l’apprendre en complément de la sienne. Il s’agit de faire un effort pour l’unité en remplaçant progressivement les langues européennes par cette langue et en lui donnant la place qu’elle doit avoir dans le domaine de la communication et de connaissance. Si on ne veut plus que ce qui arrive en ce moment en Centrafrique, au Congo et au Mali arrive de nouveau, nous devons courir vers l’unité.
SONGA MBELE : EN AVANT !
Sources : Antériorité des civilisations nègres : mythe ou vérité historique, Cheilk Anta Diop, page 113 ; Burundi-info.com et African History-Histoire Africaine
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