Matignon réfléchit avec des associations aux moyens de « réparer » symboliquement ou financièrement les conséquences de la traite des Noirs, a-t-on appris de sources concordantes, vendredi 12 octobre.
Le Conseil représentatif des associations noires (CRAN) a indiqué avoir été reçu le 29 mai et lundi par des conseillers du premier ministre, Jean-Marc Ayrault, « pour discuter des réparations liées à l’esclavage ». « Le cabinet du premier ministre s’est engagé à organiser une réunion interministérielle sur cette thématique d’ici le 8 novembre », a ajouté le président du CRAN, Louis-Georges Tin, dans un communiqué.
Ces réunions ont bien eu lieu, a confirmé une source à Matignon, en soulignant que le terme de « réparation » était « connoté » et « devrait être modifié ». « Les réparations ne seront pas seulement, et peut-être même pas du tout financières mais passeront aussi par la justice, l’éducation… Toutes les pistes sont possibles », a précisé cette source.
HOLLANDE ET LES « FAUTES » DE LA FRANCE
Quand il était maire de Nantes, première ville négrière de France, Jean-Marc Ayrault a soutenu le travail de mémoire sur le sujet. En mars, un Mémorial de l’abolition de l’esclavage y a été inauguré.
En visite officielle au Sénégal, François Hollande – qui a reconnu jeudi « des fautes » de la France dans le passé, citant la traite négrière –, devait se rendre vendredi à la Maison des esclaves, sur l’île de Gorée, au large de Dakar.
L’esclavage a été officiellement aboli en France en 1848. Le 10 mai 2001, la loi dite « Taubira » lui a reconnu le caractère de crime contre l’humanité. Les seules compensations jamais versées depuis la fin de la traite des Noirs l’ont été aux colons, et jamais aux victimes : Haïti a payé « un tribut à la France » de 1825 à 1946 pour compenser son indépendance, et les planteurs de canne à sucre ont reçu des fonds pour leur manque à gagner après l’abolition de l’esclavage en 1848.
« APPEL POUR UN DÉBAT NATIONAL »
Le Monde.fr publie par ailleurs vendredi un « appel pour un débat national sur les réparations liées à l’esclavage », signé par le député européen Daniel Cohn-Bendit (EELV), l’ex-ministre de la culture Jack Lang, ou encore le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault.
« En France, la loi du 21 mai 2001 (…) a constitué un geste de réparation symbolique, historique et culturelle », rappellent ses signataires. « Mais aujourd’hui, il convient de relancer le débat sur les réparations (pour) répondre à l’héritage durable de l’esclavage colonial : racisme anti-noir, discriminations, inégalité. »
L’appel mentionne la situation des Etats-Unis, où des entreprises ayant bénéficié de l’esclavage dans le passé ont mis en place des programmes de réparation, notamment en offrant des bourses d’études à des jeunes de ghettos noirs. Sans préjuger de la solution à retenir pour la France, les signataires de l’appel souhaitent l’ouverture d’un débat parlementaire et la multiplication des initiatives de villes ou d’entreprises.
Source : lemonde.fr
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