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[CULTURE] D’OÙ VIENT LE RAP ET QU’EST CE QUE L’ON EN A FAIT ?

C‘est dans les années 1960, à la grande époque des luttes pour les droits civiques aux États-Unis, que « The Last Poets » (crée à Harlem -New York- en 1968), reconnu unanimement comme le premier groupe de rap sur le plan historique, pose les jalons de cet art. L’un des membres fondateurs du groupe est Felipe Luciano, futur dirigeant des « Young Lords » (organisation révolutionnaire alliée des Blacks Panthers).

Dans la même période, et dans la même trempe, H. « RAP » Brown (ou Imam Jamil Abdullah Al-Amin), réputé pour son habileté à rapper, d’où son surnom, « Rap » Brown, enregistre en 1969 un album intitulé : « SNCC’S Rap ». Après avoir dirigé le SNCC, l’un des plus importants organismes du mouvement afro-américain pour les droits civiques, il rejoint le Black Panther Party, dont il devient le ministre de la justice en 1968. Le reste de sa vie témoigne de sa sincérité, de son courage et de son engagement.

En 1971, toujours dans la même ligne, Gil Scott Heron, avec le morceau « The revolution will not be televised », s’inspire directement de cet art naissant, à travers lequel l’artiste diffuse un message conscient et politisé, marque de fabrique indélébile du rap.

Le rap existe donc déjà sous sa forme authentique, quand en 1974, Afrika Bambaataa et Dj Kool Herc inventent le hip-hop. Cette année là, ou les Block partys se multiplient (soirées dansantes non autorisées organisées en pleine rue où se retrouvent les gens des ghettos pour s’amuser), apparaît le MC-ing.

Le MC-ing est l’art de chauffer la foule à l’aide d’un micro, et de mettre en valeur, quelques fois en rimaillant, les protagonistes de la soirée, le tout dans une ambiance festive.
Coke La Rock, ambianceur de renom, est reconnu unanimement comme le premier MC sur le plan historique (1975).

Progressivement, Les MC vont délaisser la simple animation de soirées, pour s’adonner aux bouts de textes à la rime frivole posés sur la rythmique lâchée par les platines fumantes du DJ.
Le MCing, devient en quelques années un mode d’expression à travers lequel l’égo des MC, mais aussi leur amour de l’argent et des biens matériels, ainsi que leur désir intense de gloire et de succès, vont pouvoir s’exprimer librement.

Chant du divertissement, portant déjà un nom, il va pourtant être présenté au grand public sous l’appellation de « rap », et, comme l’une des disciplines artistiques dites hip-hop.

Considéré par certains comme le premier titre de rap, le morceau « Rapper’s delight  » (1979), du groupe « Shugarhill gang », un boyz band de MC monté de toutes pièces qui va connaitre un succès phénoménal, est le résultat et l’exemple parfait de cette manipulation.

Sous le règne du hip-hop, le « rap » va être à la fois, rap égotrip, rap alternatif, rap hardcore, porno rap, rap bling bling, pop rap, rap gay, gangsta rap … , et parfois seulement, rap conscient.
Sous son règne, il fait d’abord l’apologie de la fête et du luxe, de l’insouciance et de la futilité, de la vulgarité et du sexisme. Il prône les valeurs de la société de consommation. Il est le vecteur de la culture de la violence et du banditisme. Il est un outil de corruption et de propagande. Un ode au capitalisme et au mondialisme.

Malgré quelques sursauts, de « The message » du groupe The Furious Five avec Grand Master Flash, à « Sodom and Gommorah » de Bishop Lamont, en passant par Public ennemy, Tragedy Khadafi, ou Immortal Technik, tout comme à l’époque des Watts Prophets (groupe originaire de Los Angeles contemporain des Last Poets et de Rap Brown ), le vrai rap n’ayant pas les moyens dont dispose l’industrie du disque ne parviendra pas à rivaliser avec le faux rap qui, de fait, s’imposera et dominera le marché.

C’est seulement parce qu’ils n’ont pas réussi à faire disparaître le vrai Rap, qu’ils vont devoir l’intégrer en tant que « rap » dit conscient, une sous catégorie de ce qu’on appelle désormais de la musique hip-hop.

Voilà comment, tout comme la mouvance révolutionnaire des années 1960 fût supplantée par le hip-hop dans les années 1970, le rap, branche artistique de la contestation et de la lutte pour les droits des peuples, sera supplanté par le MC-ing, branche artistique de la mouvance festive et matérialiste.

OU comment nous sommes passés de personnages tels que Rap Brown et les Last Poets, des rappeurs, figures mythiques de l’insurrection populaire organisée, à des Coke La Rock et Shugarhill Gang, des MC, figures mythiques des soirées dansantes.

Une fois compris le processus de transformation, il nous faut chercher le pourquoi.

Pourquoi appeler le MC-ing, du rap ?

S’agit-il d’une seule et même chose, d’un seul et même art ?

Nous avons vu que non.

Alors pourquoi ?

Existerait-il une volonté de faire oublier que le rap est un chant révolutionnaire, et non un air de fête ?

La volonté de le museler, de le mettre sous camisole le MC, de rendre inoffensif cet art de subversion massive.

Il suffit de se référer à son origine, aux vies et aux textes des premiers rappeurs, et de faire une comparaison avec les vies et les textes des pseudo-rappeurs de l’ère hip-hop pour constater à quel point c’est réussi.

Les enjeux sont politiques, culturels, spirituels, moraux, financiers, et ils constituent le mobile du crime.

Face à cela le R.A.P est toujours là, attendant qu’on en ravive la flamme, prêt à reprendre sa place et à remplir le rôle qui est le sien.

Celui de mettre l’auditeur face à ses responsabilités, de lui apporter l’espoir et la force de surmonter les épreuves de la vie, de l’encourager à fournir l’effort et à se surpasser, de le stimuler pour qu’il se prenne en main et qu’il agisse afin d’améliorer sa vie et son environnement.

Outil de revendication, de diffusion de la vérité, de dénonciation des injustices et du mensonge, il doit servir à nous motiver dans la bonne voie, nous inciter à nous éloigner des valeurs et des comportements nocifs, à nous instruire, à ne jamais renoncer à nous battre, et le moment venu, servir à galvaniser les troupes des peuples en colère et à les accompagner au combat.

S’il sert aussi à narrer des situations, des événements, des bouts de vie quotidienne, à raconter des histoires basées sur la réalité, vraies ou inventées, toujours dans le but d’éduquer et d’informer, en toute humilité, il est aussi un exutoire, un cri et un écrit de Rage et d’Amour, afin que l’être exprime en toutes lettres son mal-être comme son bonheur d’être.

Qui peut encore prétendre que le rap est autre chose qu’une prise de conscience, qu’une remise en question, qu’un encouragement à s’organiser et à lutter ?

Qui osera dire que Rap Brown était un MC ?

Sachons-le, le rap est, et a toujours été la branche artistique de la résistance humaine à l’empire du mal, à commencer par les multinationales de l’industrie culturelle.

Et s’il est vrai que le rap n’apportera pas le changement, il y contribuera, parole de rappeur.

Source: Vocer (La Razia-PoètesMaudits-Rapolitik)

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