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« LA MIGRATION VERS LE NUMÉRIQUE EST OBLIGATOIRE », SELON REMIS DANDJINOU (MINISTRE BURKINABÈ)

La migration vers le numérique est obligatoire et son intégration dans les programmes de formation représente un grand enjeu pour le gouvernement burkinabè. C’est sur ces questions que le ministre burkinabè de la Communication et des relations avec le Parlement, Remis Fulgance Dandjinou, s’est prononcé dans l’interview qu’il nous a accordée jeudi 28 février à son cabinet, en marge de sa rencontre avec les responsables des écoles et instituts de formation en communication et cinéma.

NN : M. le ministre, plusieurs écoles sont venues participer au cinquantenaire du Fespaco. Vous-même avez été au Mica (Marché international du cinéma africain) où vous avez visité beaucoup de stands. Dites-nous ce qui vous a le plus impressionné.

RFD : C’est la présence des acteurs. Vous savez pour moi, ce qui était le plus important, c’est que les différents acteurs viennent au Burkina se rendre compte que c’est un pays qui vit. J’ai vu le dynamisme des écoles présentes au Mica. J’ai vu également la volonté de changer notre vision et d’apporter des images différentes. Donc j’aimerais féliciter tous ceux qui sont venus. La présence effective sur le terrain, c’est ce qui m’a retenu, en terme d’attention.

NN : Quelle politique le gouvernement burkinabé, votre cabinet notamment, a mis en place ou prévoit de mettre en place pour l’intégration du numérique dans la formation qu’offrent les écoles de communication et de cinéma ?

RFD : On a eu la chance en 2013 d’avoir une loi qui définissait le cadre de la mutation au niveau de la TNT (Télévision numérique terrestre, NDLR). Ça a obligé donc les acteurs au niveau du gouvernement comme au niveau des écoles à se mettre en place pour saisir cette opportunité-là. La télévision a fait la mutation, et en tout numérique. Mais il est clair aujourd’hui que pour les écoles, ça prend plus de temps. Et ce n’est qu’au cours de l’année académique 2017-2018 que l’ISTIC (Institut des sciences et techniques de l’information et de la communication, NDLR) a pu mettre en place un véritable studio pour entreprendre la formation à ces nouveaux métiers, mais également à cette adaptation obligatoire. Il y a des choses toutes simples aujourd’hui qui posent problème même aux anciens. C’est le fait par exemple d’être JRI (Journaliste reporter d’images, NDLR). Pour nos organes, c’est quelque chose de nouveau qui peut choquer. Il y a des choses qui n’existaient pas : tous ces aspects-là, toute la synergie qu’on doit créer avec les nouveaux métiers. Aujourd’hui, si une radio estime qu’elle va exister seulement sur les ondes, elle est morte, parce qu’il faut qu’elle soit présente également sur les réseaux sociaux. Donc nous mettons en synergie cet espace pour faire bénéficier nos médias de cette offre extraordinaire que ça (le numérique, NDLR) nous donne. Nous y travaillons, ce n’est pas parfait. Mais nous essayons petit à petit d’achever cette progression vers un tout numérique qui est obligatoire.

NN : Y a-t-il des objectifs particuliers que votre administration s’est assignés, en tant que nouvelle équipe au ministère de la communication burkinabè ?

RFD : En tant que ministre, on m’a donné des objectifs simples. Je suis en charge de la communication. Mon rôle, c’est de rendre visible la communication gouvernementale, de créer un espace juridique qui soit favorable au développement des médias, également un environnement économique et financier. Et puis, il y a une question chez nous qui est essentielle : c’est l’opérationnalisation d’une loi qui a été votée en 2015, qui est la loi qui donne accès à l’information publique et aux documents administratifs. Ça voudrait dire que tout burkinabè doit pouvoir avoir accès à des documents administratifs quand il le demande. Et cette loi-là, elle est un élément de gouvernance très important, pas seulement pour les journalistes, mais pour tous les citoyens. Et nous avons la charge de la rendre opérationnelle. Le Premier ministre nous a encore rappelé cet objectif lors de sa déclaration de politique générale, il y a quelques semaines. Nous avons aussi un objectif qui est très fort, c’est de fixer le coût de la redevance. Vous savez, le premier multiplex de notre pays compte dix-sept chaînes de télévision. La SBT (Société burkinabé de télédiffusion, NDLR) qui est le diffuseur national doit percevoir des redevances. Mais ces redevances ne doivent pas tuer l’activité économique de ces entreprises. Et nous devons protéger notre espace, le temps nécessaire, pour ne pas que les acteurs privés autres que nationaux puissent intervenir au niveau de la TNT. Des pays ont fait le choix d’avoir des acteurs non-nationaux dans la TNT, mais moi, je dis : quand je vais en France, il n’y a pas de télévision étrangères sur la TNT. Donc ma TNT est pour les médias burkinabè essentiellement d’abord. Mais il faut que ce soit un système économique qui survit. Nous travaillons donc à créer ce système-là. Ça fait partie des missions qui m’ont été confiées. J’ai la chance d’être au gouvernement depuis que le président a été élu, donc je travaille dessus depuis maintenant trois ans.

NN : D’après un récent classement de Reporters Sans Frontière, en matière de liberté de la presse, le Burkina occupe la cinquième place en Afrique. Un exemple dans la sous-région. Que pourriez-vous conseiller à d’autres pays du continent qui voudraient suivre votre exemple ?

RFD : Il n’y a pas de conseil à donner à des pays. Chaque pays a un contexte, un environnement. Et chaque pays porte à maturation, au fur et à mesure, ses textes. Nous avons eu la chance et la malchance d’avoir quelques morts célèbres. En 1998, nous avons vu Norbert Zongo se fait brûler avec trois de ses compagnons dont son frère. À partir de ce moment-là, la presse burkinabè est entrée dans une logique totalement différente. Mais si je dis cela, j’occulte le fait que depuis le départ, nous avons des médias qui sont très forts. Les premières presses libres en Afrique francophone sont nées au Sénégal et au Burkina Faso. La première radio, la première télévision, c’est au Burkina. C’est vrai qu’après, on prend du retard technologique, mais nous avons une culture, qui est une culture de très forte expression. Et lorsque vous connaissez Nobert Zongo, L’Insurrection…, aucun journaliste ne traite l’information de la même façon. Et aucun politique ne peut demander à un journaliste de traiter l’information c’était la voix du maître. Donc ce sont des réalités. Nous avons eu, même sous le régime Compaoré, des textes qui étaient de très bons textes. Nous avons donc bénéficié d’une progression évolutive qui a abouti à cette situation. Mais chaque pays fait son histoire, il n’y a pas de leçon à donner à un pays. Les contextes sont différents. Donc les acteurs doivent prendre en charge cette liberté-là et la porter à maturation.

Propos recueillis par Stéphane BAI

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